Proposition de loi Rilhac : décryptage et calendrier
popularité : 13%
L’Assemblée nationale a adopté en seconde lecture
la proposition de loi Rilhac créant la fonction de directeur·rice
d’école le 29 septembre 2021. Le SNUipp-FSU alerte sur les changements
fondamentaux en cours au niveau du fonctionnement des écoles.
Pour mémoire : un état des lieux explicite réalisé par le ministère lui-même
L’enquête ministérielle de l’automne 2019, adressée aux
directeurs·trices a conclu sur un état des lieux et des conclusions
complètement contradictoires avec ce que la loi RILHAC propose. Les 65 %
des 44500 directrices et directeurs qui avaient répondu, déclaraient :
qu’il·elles estimaient leur autorité reconnue par les IEN (82%), les élu·e·s municipaux·pales (82%), les enseignant·e·s (81%).
qu’il·elles ne souhaitaient pas de statut (91%)
que
leurs demandes étaient et sont toujours de disposer de moyens et de
temps pour assurer ce qu’ils considèrent le cœur de leur fonction : "le
suivi collectif des élèves et des projets pédagogiques, le travail en
équipe, le pilotage de l’équipe ".
Ce qui a été voté par les députés le 29 septembre
Une « autorité fonctionnelle »
avec délégation de l’autorité académique, poste à profil avec contrat
d’objectifs et donc la possibilité pour la·le DASEN de retirer la
mission : " L’ensemble de ses missions est défini à la suite d’un
dialogue avec l’inspection académique."
L’amendement qui demandait d’inscrire dans le texte : "Le·la directeur·trice n’exerce pas d’autorité hiérarchique" a été rejeté.
une augmentation des responsabilités et de la charge de travail :
" Le directeur d’école peut être chargé de missions de formation ou de
coordination." La délégation de compétences de l’autorité académique
conduira les directeurs et directrices à rendre des comptes sur des
missions qui ne leur incombent pas comme "la mise en place de bonnes
pratiques" remettant en cause la formation, la professionnalité et la
liberté pédagogique des équipes.
décharges : aucune avancée, au contraire...
Le directeur d’école doit pouvoir "disposer du temps
nécessaire à l’exercice des responsabilités que comporte sa fonction en
matière de pilotage pédagogique, de fonctionnement de l’école et de
relations avec les parents et les partenaires de l’école".
MAIS : "Le directeur
d’école bénéficie d’une décharge totale ou partielle d’enseignement.
Cette décharge est déterminée en fonction du nombre de classes et des
spécificités de l’école, dans des conditions fixées par le ministre de
l’éducation et qui lui permettent de remplir effectivement ses
fonctions."
aide administrative : aucune avancée, au contraire...
Le texte initial : "l’état met à disposition des directeurs d’écoles les moyens permettant de garantir l’assistance administrative de ces derniers" est devenu : " l’état et les communes ou leurs groupements peuvent, dans le cadre de leurs compétences respectives ...".
Concrètement aucune garantie et aucune équité entre les écoles.
salaires : aucune nouvelle avancée"Les
enseignants nommés à l’emploi de directeur d’école bénéficient d’une
indemnité de direction spécifique ainsi que d’un avancement accéléré au
sein de leur corps, dans des conditions fixées par décret en Conseil
d’État. "
formation :
Suppression de la formation certifiante
Suppression de la formation obligatoire “tous les 5 ans” remplacé par "régulièrement"
Les articles inchangés
L’existence d’un référent directeur
La possibilité de vote électronique après avis du conseil d’école
La dispense d’APC du directeur
La co-validation du PPMS par l’Education Nationale et la collectivité territoriale
En parallèle, le président Macron a annoncé l’expérimentation des 50 écoles laboratoires à Marseille (lire ici).
Cumulé à la multiplication des postes à profil, des contrats locaux en fonction des projets des écoles, la déréglementation de l’éducation prioritaire, la hausse du budget public pour les écoles privées..., la remise en question du service public d’éducation dans sa mission d’équité sur tout le territoire est clairement "en marche" !
Ce sont les mobilisations qui avaient fait reculer les projets néfastes (maîtres-directeurs, EPEP, EPLESF).
Et ensuite ?
Dans l’immédiat le texte n’entre pas en application. La
loi doit être adoptée dans les mêmes termes par le Sénat. Elle doit y
passer le 20 octobre. La loi devrait entrer en application pour la
rentrée 2022.
Les offensives contre le fonctionnement de l’école sont récurrentes, avec à chaque fois une même vision conservatrice, une même volonté d’installer de la verticalité dans le collectif enseignant. Mais ces réformes ont toujours rencontré une forte opposition de l’ensemble de la profession et ont été abandonnées suite à des mobilisations massives. Une voie à suivre...
La mobilisation contre cette loi se poursuit. Notre
force collective peut faire plier le gouvernement. Les enseignant·es,
parmi lesquels les directeur·trices, ne veulent pas de cette loi qui
n’aidera en aucune manière les écoles, alourdira les tâches et les
responsabilités. (En 1987, lors d’une précédente réforme, le texte était paru et finalement le gouvernement suivant l’avait annulé).
« Il faut retrouver du collectif dans un métier qui se fait terriblement seul face à une administration enfermée dans ses logiques managériales dont on connait les effets dévastateurs sur la qualité du travail et donc sur la santé de ceux qui le font » Frédéric Grimaud, Le travail contrarié de la direction, Fenêtres sur cours n°461
Lire en pièce jointe le 4 pages : "Quel fonctionnement pour quelle école ?
Prendre la bonne direction"